C’est avec tristesse qu’en cette fin d’année nous apprenons le décès d’Anne Gaudu, illustre traductrice de littérature allemande (Uwe Johnson, Stephan Hermlin, etc.) ou d’auteurs de langue allemande (Peter Handke notamment), et première à traduire en français des œuvres d’Alexander Kluge lequel a souhaité dédier le texte suivant à sa mémoire :
La véritable histoire de l’arche de Noé
Dieu se désintéressa de sa créature, dit-on. Il était prêt à défaire son ouvrage ou pour le moins à « se retirer de sa création », de sorte que cet ouvrage, à savoir l’humanité, périsse par les forces de la nature.
Une interprétation de second ordre de ce « retrait observé de Dieu » (elle est confirmée par tous les rabbins et prophètes dignes de confiance) en recherche la cause dans l’amour d’un ange de rang supérieur pour une terrienne, de même qu’une autre, de second ordre tout autant, dans le fait que l’un des fils de Noé se serait approprié la femme de son frère, l’obligeant à se soumettre par la violence. Les causes, commente rabbi Bakri, ne sont pas la matière première d’où le Tout-puissant tire ses décisions.
Selon la légende, le pieux Noé aurait convaincu Dieu par ses prières d’autoriser avant l’anéantissement de l’humanité l’équipement d’un bateau qui préserverait du déluge un exemplaire de chaque spécimen attesté de la Création. Ensuite, le bateau en question atteignit le mont Ararat, où les passagers mirent pied à terre, amorçant la première mondialisation, en l’absence néanmoins d’êtres vivants comme la licorne ou encore du MAL ABSOLU, qui ne survécurent pas.
Cette traduction des Saintes Écritures, qui déjà ne furent pas inclus dans la Septante et dont seuls des textes apocryphes font le commentaire, est manifestement erronée, affirme un érudit fiable de la région de Naples. Barca = bateau en italien, à savoir le véhicule de Noé, est confondu avec l’expression hébraïque renvoyant à un coffre contenant des écrits. Doutant de sa Création, c’est-à-dire de son « inscription dans le réel », Dieu autorisa Noé à transporter un COFFRE REMPLI DE LIVRES. Celui-ci fut mis à l’abri sur le Mont Ararat comme « unique source de cohésion pour l’humanité ». Cette source supposerait l’aptitude à pratiquer les textes, donc à les lire. L’espèce humaine, affirme rabbi Bakri, se distinguerait des autres animaux non pas par sa vivacité, son entêtement ou son intelligence, mais par la connaissance de l’Écriture. Les écrits impliquent l’HUMILITÉ, c’est-à-dire la conscience de soi ; même si nous savons peu de choses, nous pouvons nous fier aux dimensions visuelles et auditives de ce qui s’y trouve consigné (car en tant qu’homo compensator, dit rabbi Bakri, nous sommes « équilibristes » par essence).
La véritable histoire de l’arche de Noé
Dieu se désintéressa de sa créature, dit-on. Il était prêt à défaire son ouvrage ou pour le moins à « se retirer de sa création », de sorte que cet ouvrage, à savoir l’humanité, périsse par les forces de la nature.
Une interprétation de second ordre de ce « retrait observé de Dieu » (elle est confirmée par tous les rabbins et prophètes dignes de confiance) en recherche la cause dans l’amour d’un ange de rang supérieur pour une terrienne, de même qu’une autre, de second ordre tout autant, dans le fait que l’un des fils de Noé se serait approprié la femme de son frère, l’obligeant à se soumettre par la violence. Les causes, commente rabbi Bakri, ne sont pas la matière première d’où le Tout-puissant tire ses décisions.
Selon la légende, le pieux Noé aurait convaincu Dieu par ses prières d’autoriser avant l’anéantissement de l’humanité l’équipement d’un bateau qui préserverait du déluge un exemplaire de chaque spécimen attesté de la Création. Ensuite, le bateau en question atteignit le mont Ararat, où les passagers mirent pied à terre, amorçant la première mondialisation, en l’absence néanmoins d’êtres vivants comme la licorne ou encore du MAL ABSOLU, qui ne survécurent pas.
Cette traduction des Saintes Écritures, qui déjà ne furent pas inclus dans la Septante et dont seuls des textes apocryphes font le commentaire, est manifestement erronée, affirme un érudit fiable de la région de Naples. Barca = bateau en italien, à savoir le véhicule de Noé, est confondu avec l’expression hébraïque renvoyant à un coffre contenant des écrits. Doutant de sa Création, c’est-à-dire de son « inscription dans le réel », Dieu autorisa Noé à transporter un COFFRE REMPLI DE LIVRES. Celui-ci fut mis à l’abri sur le Mont Ararat comme « unique source de cohésion pour l’humanité ». Cette source supposerait l’aptitude à pratiquer les textes, donc à les lire. L’espèce humaine, affirme rabbi Bakri, se distinguerait des autres animaux non pas par sa vivacité, son entêtement ou son intelligence, mais par la connaissance de l’Écriture. Les écrits impliquent l’HUMILITÉ, c’est-à-dire la conscience de soi ; même si nous savons peu de choses, nous pouvons nous fier aux dimensions visuelles et auditives de ce qui s’y trouve consigné (car en tant qu’homo compensator, dit rabbi Bakri, nous sommes « équilibristes » par essence).
(Traduit de l’allemand par Vincent Pauval)