La véritable histoire de l’arche de Noé
Dieu se désintéressa de sa créature, dit-on. Il était prêt à défaire son ouvrage ou pour le moins à « se retirer de sa création », de sorte que cet ouvrage, à savoir l’humanité, périsse par les forces de la nature.
Une interprétation de second ordre de ce « retrait observé de Dieu » (elle est confirmée par tous les rabbins et prophètes dignes de confiance) en recherche la cause dans l’amour d’un ange de rang supérieur pour une terrienne, de même qu’une autre, de second ordre tout autant, dans le fait que l’un des fils de Noé se serait approprié la femme de son frère, l’obligeant à se soumettre par la violence. Les causes, commente rabbi Bakri, ne sont pas la matière première d’où le Tout-puissant tire ses décisions.
Selon la légende, le pieux Noé aurait convaincu Dieu par ses prières d’autoriser avant l’anéantissement de l’humanité l’équipement d’un bateau qui préserverait du déluge un exemplaire de chaque spécimen attesté de la Création. Ensuite, le bateau en question atteignit le mont Ararat, où les passagers mirent pied à terre, amorçant la première mondialisation, en l’absence néanmoins d’êtres vivants comme la licorne ou encore du MAL ABSOLU, qui ne survécurent pas.
Cette traduction des Saintes Écritures, qui déjà ne furent pas inclus dans la Septante et dont seuls des textes apocryphes font le commentaire, est manifestement erronée, affirme un érudit fiable de la région de Naples. Barca = bateau en italien, à savoir le véhicule de Noé, est confondu avec l’expression hébraïque renvoyant à un coffre contenant des écrits. Doutant de sa Création, c’est-à-dire de son « inscription dans le réel », Dieu autorisa Noé à transporter un COFFRE REMPLI DE LIVRES. Celui-ci fut mis à l’abri sur le Mont Ararat comme « unique source de cohésion pour l’humanité ». Cette source supposerait l’aptitude à pratiquer les textes, donc à les lire. L’espèce humaine, affirme rabbi Bakri, se distinguerait des autres animaux non pas par sa vivacité, son entêtement ou son intelligence, mais par la connaissance de l’Écriture. Les écrits impliquent l’HUMILITÉ, c’est-à-dire la conscience de soi ; même si nous savons peu de choses, nous pouvons nous fier aux dimensions visuelles et auditives de ce qui s’y trouve consigné (car en tant qu’homo compensator, dit rabbi Bakri, nous sommes « équilibristes » par essence).
(Traduit de l’allemand par Vincent Pauval)
Dieu se désintéressa de sa créature, dit-on. Il était prêt à défaire son ouvrage ou pour le moins à « se retirer de sa création », de sorte que cet ouvrage, à savoir l’humanité, périsse par les forces de la nature.
Une interprétation de second ordre de ce « retrait observé de Dieu » (elle est confirmée par tous les rabbins et prophètes dignes de confiance) en recherche la cause dans l’amour d’un ange de rang supérieur pour une terrienne, de même qu’une autre, de second ordre tout autant, dans le fait que l’un des fils de Noé se serait approprié la femme de son frère, l’obligeant à se soumettre par la violence. Les causes, commente rabbi Bakri, ne sont pas la matière première d’où le Tout-puissant tire ses décisions.
Selon la légende, le pieux Noé aurait convaincu Dieu par ses prières d’autoriser avant l’anéantissement de l’humanité l’équipement d’un bateau qui préserverait du déluge un exemplaire de chaque spécimen attesté de la Création. Ensuite, le bateau en question atteignit le mont Ararat, où les passagers mirent pied à terre, amorçant la première mondialisation, en l’absence néanmoins d’êtres vivants comme la licorne ou encore du MAL ABSOLU, qui ne survécurent pas.
Cette traduction des Saintes Écritures, qui déjà ne furent pas inclus dans la Septante et dont seuls des textes apocryphes font le commentaire, est manifestement erronée, affirme un érudit fiable de la région de Naples. Barca = bateau en italien, à savoir le véhicule de Noé, est confondu avec l’expression hébraïque renvoyant à un coffre contenant des écrits. Doutant de sa Création, c’est-à-dire de son « inscription dans le réel », Dieu autorisa Noé à transporter un COFFRE REMPLI DE LIVRES. Celui-ci fut mis à l’abri sur le Mont Ararat comme « unique source de cohésion pour l’humanité ». Cette source supposerait l’aptitude à pratiquer les textes, donc à les lire. L’espèce humaine, affirme rabbi Bakri, se distinguerait des autres animaux non pas par sa vivacité, son entêtement ou son intelligence, mais par la connaissance de l’Écriture. Les écrits impliquent l’HUMILITÉ, c’est-à-dire la conscience de soi ; même si nous savons peu de choses, nous pouvons nous fier aux dimensions visuelles et auditives de ce qui s’y trouve consigné (car en tant qu’homo compensator, dit rabbi Bakri, nous sommes « équilibristes » par essence).
(Traduit de l’allemand par Vincent Pauval)
Une
parade pour la nuit de la Saint-Sylvestre 1918 à Paris
Comment nous apprîmes tardivement à retenir l’impression subjective sur le matériau filmé.
Cette nuit-là nous pouvions tourner sans restriction. Non seulement parce que le matériel était disponible (il fallait l’utiliser, à moins d’avoir à le ramener dans l’entrepôt, où il aurait fini par moisir), mais également parce que cette nuit-là offrait un riche éclairage. Chaque motif ou presque était largement pourvu de guirlandes lumineuses, comme si les éléments qui indiquaient typiquement la fin de cette longue guerre, se trouvaient spécialement éclairés pour l’enregistrement du film. Les troupes étaient revenues à Paris pour le réveillon. Elles campaient en banlieue et dans les environs de la capitale. Elles s’étaient préparées en vue de cette ULTIME PARADE. Le lendemain elles allaient être reconduites à leurs bases d’origine pour y être libérées. Depuis cinq heures de l’après-midi elles rejoignaient le centre-ville par les boulevards. C’était une ambiance étrangement triste que celle qui régnait sur ces cortèges. Elle ne fut pas telle que quiconque se fût réjoui de la fin de cette guerre. Pas plus qu’on semblait attristé, parce qu’on désirait revenir aux temps d’épouvante laissés derrière soi ; leur tristesse provenait plutôt de ce que l’effort de tant d’années, que cette guerre aient pu s’effectuer sans que le moindre changement dans la vie ne puisse être exigé en récompense des privations. On n’y avait que perdu.
Aidés par des électriciens de la ville, les pionniers avaient fixé des guirlandes d’ampoules sur les blindés, semblables aux guirlandes lumineuses enfilées sur les mâts des bateaux à l’occasion des parades navales d’avant-guerre. Éclairés de la sorte, les véhicules blindés semblaient avoir repris leur allure première de tracteurs. Ils transportaient des signes d’espoir tout en lumière. Ces guirlandes étaient supportées par les canons et les trains des équipages. Les fantassins avaient fixé des ampoules sur leurs casques et avançaient en rang dans des convois lumineux, tâchant de passer dans les intervalles laissés par les chars et les attelages d’artillerie. Les troupes s’approchaient de l’Arc de Triomphe par les rues attenantes, ou elles tournaient autour de ce point central sur des voies parallèles, le long desquelles étaient installées des estrades qui accueillaient les hauts commandants, les hôtes royaux et Monsieur le Président.
Rude tâche que la nôtre d’assurer ensuite le montage d’un film à partir du matériau enregistré. Ce moment nous avait captivés. Les yeux étaient fascinés par les lumières qui passaient là, devant nous, en rythme régulier (toute une nuit durant). Ces deux sensations, l’excitation de nos sens par les lumières et le sentiment de « toute une nuit », allaient plus tard se révéler introuvables sur nos rebobineuses, à l’aide desquelles nous nous apprêtions à visionner le matériau pour le couper. Impossible de restituer la relation à ce contexte qui nous avait saisis et qui se trouvait en permanence hors-champ. En fait, c’étaient toujours les mêmes images : ampoules électriques se balançant le long de fils et mouvement incessant du défilé.
Ceci nous donna de l’expérience. La fois suivante nous serions parvenus à mieux saisir cet événement peu ordinaire. Seulement, ne fallait-il pas s’attendre à ce qu’une telle FINALE DE GRANDE GUERRE soit donné de notre vivant (ou durant mon service comme caméraman des armées). Comme nous le savions désormais, il fallait braquer la caméra non pas directement sur les corps lumineux (qui séduisaient le regard), mais sur les ombres qui se déplaçaient devant les ampoules. Le matériau exposé se repère toujours à partir du point le mieux éclairé et du point le plus sombre d’un plan. Ainsi la lumière éclatante des ampoules voilait-il les péripéties essentielles qui avaient lieu au bord de son halo et surtout au centre, entre deux lampes, ou au premier plan et dont on pouvait filmer l’effet d’interruption par la lumière. Ces ombres que nous aurions souhaité enregistrer (car les yeux épris du scintillement avaient « inconsciemment » aussi vu cela), auraient rendu la tristesse dont je parlais plus haut et qui dominait l’impression donnée par le cortège. Ces impressions générales sont difficiles à saisir avec les moyens du cinéma. Ni le montage ni la longue durée d’attention qui maintient la caméra comme à l’affût dans une certaine position, ne permettent de restituer cette « impression générale ». Il faut commencer par filmer à côté de l’événement, effleurer brièvement cet événement pour capturer, avec un peu de chance, ce qui répond subjectivement et du fond du ressenti à « toute la nuit ».
(Traduit de l’allemand par Vincent Pauval)
Comment nous apprîmes tardivement à retenir l’impression subjective sur le matériau filmé.
Cette nuit-là nous pouvions tourner sans restriction. Non seulement parce que le matériel était disponible (il fallait l’utiliser, à moins d’avoir à le ramener dans l’entrepôt, où il aurait fini par moisir), mais également parce que cette nuit-là offrait un riche éclairage. Chaque motif ou presque était largement pourvu de guirlandes lumineuses, comme si les éléments qui indiquaient typiquement la fin de cette longue guerre, se trouvaient spécialement éclairés pour l’enregistrement du film. Les troupes étaient revenues à Paris pour le réveillon. Elles campaient en banlieue et dans les environs de la capitale. Elles s’étaient préparées en vue de cette ULTIME PARADE. Le lendemain elles allaient être reconduites à leurs bases d’origine pour y être libérées. Depuis cinq heures de l’après-midi elles rejoignaient le centre-ville par les boulevards. C’était une ambiance étrangement triste que celle qui régnait sur ces cortèges. Elle ne fut pas telle que quiconque se fût réjoui de la fin de cette guerre. Pas plus qu’on semblait attristé, parce qu’on désirait revenir aux temps d’épouvante laissés derrière soi ; leur tristesse provenait plutôt de ce que l’effort de tant d’années, que cette guerre aient pu s’effectuer sans que le moindre changement dans la vie ne puisse être exigé en récompense des privations. On n’y avait que perdu.
Aidés par des électriciens de la ville, les pionniers avaient fixé des guirlandes d’ampoules sur les blindés, semblables aux guirlandes lumineuses enfilées sur les mâts des bateaux à l’occasion des parades navales d’avant-guerre. Éclairés de la sorte, les véhicules blindés semblaient avoir repris leur allure première de tracteurs. Ils transportaient des signes d’espoir tout en lumière. Ces guirlandes étaient supportées par les canons et les trains des équipages. Les fantassins avaient fixé des ampoules sur leurs casques et avançaient en rang dans des convois lumineux, tâchant de passer dans les intervalles laissés par les chars et les attelages d’artillerie. Les troupes s’approchaient de l’Arc de Triomphe par les rues attenantes, ou elles tournaient autour de ce point central sur des voies parallèles, le long desquelles étaient installées des estrades qui accueillaient les hauts commandants, les hôtes royaux et Monsieur le Président.
Rude tâche que la nôtre d’assurer ensuite le montage d’un film à partir du matériau enregistré. Ce moment nous avait captivés. Les yeux étaient fascinés par les lumières qui passaient là, devant nous, en rythme régulier (toute une nuit durant). Ces deux sensations, l’excitation de nos sens par les lumières et le sentiment de « toute une nuit », allaient plus tard se révéler introuvables sur nos rebobineuses, à l’aide desquelles nous nous apprêtions à visionner le matériau pour le couper. Impossible de restituer la relation à ce contexte qui nous avait saisis et qui se trouvait en permanence hors-champ. En fait, c’étaient toujours les mêmes images : ampoules électriques se balançant le long de fils et mouvement incessant du défilé.
Ceci nous donna de l’expérience. La fois suivante nous serions parvenus à mieux saisir cet événement peu ordinaire. Seulement, ne fallait-il pas s’attendre à ce qu’une telle FINALE DE GRANDE GUERRE soit donné de notre vivant (ou durant mon service comme caméraman des armées). Comme nous le savions désormais, il fallait braquer la caméra non pas directement sur les corps lumineux (qui séduisaient le regard), mais sur les ombres qui se déplaçaient devant les ampoules. Le matériau exposé se repère toujours à partir du point le mieux éclairé et du point le plus sombre d’un plan. Ainsi la lumière éclatante des ampoules voilait-il les péripéties essentielles qui avaient lieu au bord de son halo et surtout au centre, entre deux lampes, ou au premier plan et dont on pouvait filmer l’effet d’interruption par la lumière. Ces ombres que nous aurions souhaité enregistrer (car les yeux épris du scintillement avaient « inconsciemment » aussi vu cela), auraient rendu la tristesse dont je parlais plus haut et qui dominait l’impression donnée par le cortège. Ces impressions générales sont difficiles à saisir avec les moyens du cinéma. Ni le montage ni la longue durée d’attention qui maintient la caméra comme à l’affût dans une certaine position, ne permettent de restituer cette « impression générale ». Il faut commencer par filmer à côté de l’événement, effleurer brièvement cet événement pour capturer, avec un peu de chance, ce qui répond subjectivement et du fond du ressenti à « toute la nuit ».
(Traduit de l’allemand par Vincent Pauval)
Râle-bol
Pas d’essence dans les stations-services, des perturbations dans les TGV, des retards grotesques à l’aéroport Roissy Charles-de-Gaulle. C’était là le résultat des mouvements de grève contre le relèvement à 62 ans de l’âge de la retraite en France, un projet de loi Sarkozy, qui devait passer au Sénat ce mercredi-là. Quoi que Stefan Aust eût tenté, ce n’est qu’avec un retard conséquent qu’il finit par gagner Berlin depuis Paris. Il était toujours très doué pour donner un résumé condensé de ses impressions du moment. Il s’exprima comme voici :
- La grande France me fait penser à une RDA bis.
- Comment ça ?
- Une parfaite société de réparations.
- Oui, mais la RDA n’était pas parfaite.
- La France, elle, est parfaite à sa façon !
- Parce qu’elle ne tient pas de la révolution d’Octobre, mais de la Grande Révolution française ?
- Elle ne tient d’aucune révolution.
- À partir de quoi serait-elle faite sinon ?
- Elle fait exception. La France n’est pas un programme, mais tout un état des choses.
- Qu’est-ce qui te fait dire cela ? Juste qu’il n’y ait plus d’essence dans les stations-services ?
- Nulle part dans le monde une société ne met autant d’art à s’arranger d’une grève générale que cela se fait en France. On appelle ça bricolage.
- D’après Lévi-Strauss, le bricolage correspond au principe de l’évolution.
- Pour survivre, c’est ainsi que les sociétés doivent s’y prendre.
En à peine quelques répliques, Aust avait dominé son irritation initiale. Il semblait éprouver quelque sympathie à l’égard de cette France si bizarre. Se sentait-il redevable envers les difficiles conditions de circulation de l’avoir conduit à la pensée qu’il venait d’articuler ? Stefan Aust avait peu de temps. Tous ses rendez-vous s’étaient décalés en raison du retard. Ce voyageur empressé à la pensée plus empressée encore avait particulièrement à cœur un petit souvenir: le mot ralle-balle. Il n’avait jamais rien entendu de la sorte jusque-là. Le traduire par « raffut », dit-il, serait incorrect. Il passa un bon moment à chercher une expression allemande plus valable. Tard dans la nuit il m’appela pour me demander si de mon côté j’avais trouvé une traduction. On s’en tint à ralle-balle . Il s’agissait, observa Aust, d’exprimer sans retenue sa colère contre son gouvernement. Mais cela se faisait avec une routine vieille de deux cents ans (à l’inverse d’un raffut ou d’une révolte de tisserands). Que peuvent bien entreprendre la rase campagne contre Paris et ses airs supérieurs, les ouvriers contre la majorité parlementaire, les jeunes contre les vieux, les banlieues contre le centre-ville ? Ce n’est pas l’affaire d’un peuple, d’un État, d’une société, mais d’un kaléidoscope de tout cela. À cette heure tardive de la nuit, Aust était toujours préoccupé, on le sentait, par son trajet retour, si lourdement perturbé par ce qui lui était arrivé en France.
Pas d’essence dans les stations-services, des perturbations dans les TGV, des retards grotesques à l’aéroport Roissy Charles-de-Gaulle. C’était là le résultat des mouvements de grève contre le relèvement à 62 ans de l’âge de la retraite en France, un projet de loi Sarkozy, qui devait passer au Sénat ce mercredi-là. Quoi que Stefan Aust eût tenté, ce n’est qu’avec un retard conséquent qu’il finit par gagner Berlin depuis Paris. Il était toujours très doué pour donner un résumé condensé de ses impressions du moment. Il s’exprima comme voici :
- La grande France me fait penser à une RDA bis.
- Comment ça ?
- Une parfaite société de réparations.
- Oui, mais la RDA n’était pas parfaite.
- La France, elle, est parfaite à sa façon !
- Parce qu’elle ne tient pas de la révolution d’Octobre, mais de la Grande Révolution française ?
- Elle ne tient d’aucune révolution.
- À partir de quoi serait-elle faite sinon ?
- Elle fait exception. La France n’est pas un programme, mais tout un état des choses.
- Qu’est-ce qui te fait dire cela ? Juste qu’il n’y ait plus d’essence dans les stations-services ?
- Nulle part dans le monde une société ne met autant d’art à s’arranger d’une grève générale que cela se fait en France. On appelle ça bricolage.
- D’après Lévi-Strauss, le bricolage correspond au principe de l’évolution.
- Pour survivre, c’est ainsi que les sociétés doivent s’y prendre.
En à peine quelques répliques, Aust avait dominé son irritation initiale. Il semblait éprouver quelque sympathie à l’égard de cette France si bizarre. Se sentait-il redevable envers les difficiles conditions de circulation de l’avoir conduit à la pensée qu’il venait d’articuler ? Stefan Aust avait peu de temps. Tous ses rendez-vous s’étaient décalés en raison du retard. Ce voyageur empressé à la pensée plus empressée encore avait particulièrement à cœur un petit souvenir: le mot ralle-balle. Il n’avait jamais rien entendu de la sorte jusque-là. Le traduire par « raffut », dit-il, serait incorrect. Il passa un bon moment à chercher une expression allemande plus valable. Tard dans la nuit il m’appela pour me demander si de mon côté j’avais trouvé une traduction. On s’en tint à ralle-balle . Il s’agissait, observa Aust, d’exprimer sans retenue sa colère contre son gouvernement. Mais cela se faisait avec une routine vieille de deux cents ans (à l’inverse d’un raffut ou d’une révolte de tisserands). Que peuvent bien entreprendre la rase campagne contre Paris et ses airs supérieurs, les ouvriers contre la majorité parlementaire, les jeunes contre les vieux, les banlieues contre le centre-ville ? Ce n’est pas l’affaire d’un peuple, d’un État, d’une société, mais d’un kaléidoscope de tout cela. À cette heure tardive de la nuit, Aust était toujours préoccupé, on le sentait, par son trajet retour, si lourdement perturbé par ce qui lui était arrivé en France.
Unter drei Augen - Sous un triple œil
“ La loi morale en moi et le ciel étoilé au-dessus de moi ” Extrait du fascicule de formation de Souslov Chaque nuit, A. I. Souslov, spécialiste de télémétrie des fusées, voyait dans son blockhaus « en moi les deux yeux de mon bienfaiteur et formateur de longue date » Davidov, auquel il était dévoué, désireux de surpasser ses prescriptions en matière de norme de vigilance planifiée. Mais.. Lien : http://www.tk-21.com |